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E avà... estate, riposu & musica !


Quant'hè bella a musica...

« La musique est un miracle continué qui à chaque pas accomplit l’impossible » disait
Vladimir Jankelevich. La musique dit et redit, inlassablement, inépuisablement, l’expansion de la vie. La musique n’explicite rien en particulier, et pourtant elle signifie  toujours quelque chose de général la musique n’exprime ni telle joie déterminée, ni telle tristesse, mais, disait Schopenhauer, elle instille en nous la mélancolie, la joie, la  sérénité, l’espérance, sans causes : la musique exprime l’émotion indéterminée, disait pour sa part Nietzsche, la pure puissance émotionnelle, l’affectivité en soi. Pour sa part, Jankelevich a montré que la musique est un intermédiaire entre le sens et le sens du sens, entre l’essence et la quintessence, entre le sens et le charme. Rien de plus profondément ambigu que la musique, même si rien  n’est plus expressif qu’un quatuor à cordes de Beethoven
La musique n’est pas un langage utilitaire ou conceptuel ; elle est mouvante et émouvante, elle nous propose l’infini, l’indéterminé, le labyrinthe des possibles. « Inexpression expressive », la musique se déroule au-delà des catégories du tragique et du comique, du sérieux et du frivole, du jeu et de l’ordre : ludique et grave tout à la fois, la musique est autre, ailleurs hors de l’activité et de la perception. La musique est une fête, une île, un jardin ; elle est insouciante, frivole, elle ne « dit » rien et pourtant, elle recèle toutes les virtualités, elle va loin, elle pénètre dans la profondeur de notre vie.


Ce « délicieux plaisir d’une occupation inutile » (Henri de Régnier), à travers son déroulement ordonné, nous aide à nous réapproprier le temps : mélodieuse en devenir, elle est le temps lui-même, dit Jankélevich. Temps de la ligne incurvée, de l’écoute buissonnière, temps de la promenade prolongée, temps pour rien, temps qui s’attarde, temps du détour exquis. Temps qui se suffit à lui-même, sans pensées ni arrière-pensées. Il faut du temps pour apprivoiser un morceau de piano, de violon, un air d’opéra, pour aller de l’inconnu au connu. Temps de l’éphémère et de la répétition. Eternel retour de la musique qui nous rappelle que nous sommes des êtres ondulatoires, faits du flux des évènements.
La musique, ce temps du monde, rend sonore l’inaudible, rend visible l’invisible.
Face à la volonté envahissante de maîtrise du monde, la musique c’est un devenir artiste qui fait toute sa part au silence ; ce « sens dénué de sens » dont la quête est inépuisable, infatigable, inlassable, dont la répétition d’écoute est toujours une novation, on peut le vivre à longueur de vie, dans une inexprimable liberté. La musique est faite pour l’inexprimable, disait Debussy, non pas l’indicible, mais l’ineffable disait quant à lui, Jankélevitch. Ineffable enchantement de la musique qui produit cette plénitude de sens qui reste pourtant inexprimable. « Le sens du sens est donc une ineffable liberté » pour citer  toujours Jankélevitch.

Estate è musica

Nous vivons aujourd’hui au milieu d’un continent musical. Quelle chance que de pouvoir écouter chez soi Bach, Mozart, Schubert, Miles Davies, ou Django Reinhart, Massenet, l’opéra italien et la musique contemporaine, la divine comédie de Dante en paghjella, la musique concise de Ravel ou la sobriété de Debussy, les quatuors pour piano de G Fauré qui exigent tant de virtuosité… sans parler de la mélancolie de la musique slave
Comment rendre notre monde si violent plus musical ? La musique nous délivre un monde sublime. Rappelons-nous que le 19ème siècle a oublié Bach et Mozart et que Massenet n’est jamais représenté, dans ses opéras …
La musique nous révèle la variabilité du monde, sa permanente circulation .La musique nous aide à lutter contre la croissance du désert ; elle est le silence de la terre ; comme la vie, sa signification n’est jamais  que rétrospective, mais toujours en même temps  prospective, anticipatrice ; elle se situe entre sens et charme. Cet art du rien, au charme fragile « fait de rien, tenant à rien », ces préludes,  ces impromptus, ces sonates, ces solos de batteries, ces voix de la polyphonie nous parlent du destin humain, du devenir des êtres .La liberté de la création musicale nous libère ; le silence qu’elle révèle est autre chose que l’être, il n’est pas du non être. Eternelle présence de la musique qui n’expose et n’impose aucune vérité, car elle est à elle-même sa propre vérité, tout en étant dans un ailleurs, autre, hors de l’action, insaisissable, mystérieux.
Temps gagné sur le bruit, il y a beaucoup de silence dans la musique : la musique nous réconcilie avec nous-mêmes et avec la nature entière ; aventure, rencontre, la musique fait taire tous les autres bruits ; parce qu’elle est elle-même silence, elle comble les autres silences. La musique a besoin de silence.» Du silence au silence, à travers le silence » (V Jankelevitch)
Mais parler de musique est sottise : la musique c’est comme Venise ; l’expérience concrète est irremplaçable ; l’essentiel est d’écouter et de jouer de la musique, d’entrer dans les forces joyeuses de la musique. Que chacun vive  son été sous le charme de la musique et bonnes vacances à tous et à toutes !
GRAZIELLA LUISI | Mise à jour le 30/07/2015